Dans la ville lumière, les radeaux sont invisibles
19 April 2019

Paris 2002-2005.

Jeunes et fiers, ils portaient la ville. Puis, le sentiment d’être à sa place s’est peu à peu délité. Pourtant, Ils ont tenté de résister. A qui? A eux sans doute mais surtout à ceux qui, loin des marges, restent à l’abri. Ceux-là mêmes qui graduellement les ont fait vaciller. Ils étaient si forts hier, ils sont devenus vulnérables. La ville lumière n’a sans doute jamais fait de cadeaux et cela continue. Jadis, la beauté sensible, intuitive et magnifique des uns a fait place aux postures esthétiques et réfléchies des autres qui, socialement protégés prennent des poses muséales des catégories gentrifiées. Ils ont vu les refuges du passé se muer en nasses aux interstices acérées. Ils étaient si forts hier, nous sommes devenus vulnérables. Au ras des flots, secoués sur le radeau, nous n’avons plus eu le choix sinon d’avancer. Après maintes luttes, exténués et transis, nous nous sommes laissés dériver. Jadis mués par des horizons éxaltés, nous avons basculé. Nous étions si forts, nous sommes devenus vulnérables. Dans les profondeurs, nous deviendrons invisibles. (Benoit Arridiaux).