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(Textes en bas de page / Texts below)

Paris 2005.

Il quadrille la ville, traverse les arrondissements huppés et certaines zones intramuros encore populaires mais en voie d’extinction. Fréquenté par certains habitants mais aussi par les banlieusards et les touristes, il apparaît comme un véritable melting-pot social et culturel. Le métro pourrait être l’envers de la ville, Il en vaut l’endroit. Les corps ne se touchent que dans les espaces exigus. Ici bas comme là haut, nulle interférence, nul échange avec l’autre, l’inconnu. En fin de semaine, très tôt le matin, les Parisiens et les touristes qui partent en vacances ou qui arrivent ne prêtent guère attention aux travailleurs précaires (souvent immigrés) qui se rendent ou rentrent du travail. Plus tard le passager balaie au mieux du regard le musicien Roumain, le jeune sdf ou le consommateur de crack qui vient d’entrer en scène. Ces derniers parlent un peu fort. Pour se faire entendre, ils interpellent, récitent un texte appris par coeur. Se joue alors ici une pièce de théâtre et, sur les planches, le comédien semble mettre sa vie en jeu. Il cachetonne, il ferait bien relâche. Le public embarqué mange, baille, somnole parfois dans ce qui pourrait être encore un Théâtre Elisabéthain. Mais le silence lourd et partagé de l’audience stoppe net la comparaison avec le Théâtre du Globe. Dans les tunnels, aucun sourire n’apparait sur les masques. Les rires n’y résonnent plus depuis bien longtemps déjà. (Benoit Arridiaux).